Il s’appelle ChAdOx1 nCoV-19 et ce vaccin contre le Covid-19 développé au Royaume-Uni vient d’obtenir des résultats encourageants sur des macaques. Les chercheurs qui travaillent dessus estiment que s’ils arrivent à démontrer son efficacité, il pourrait être prêt pour septembre. Explications.
C’est le vaccin dont tout le monde parle… Même si son nom est difficile à prononcer. Le ChAdOx1 nCoV-19, actuellement développé par les équipes de l’université d’Oxford, s’est hissé, ces derniers jours, aux premières loges des vaccins actuellement en développement les plus prometteurs. Plusieurs signes encourageants semblent indiquer que les chercheurs britanniques « ont une longueur d’avance sur la plupart des autres laboratoires », assure ainsi le New York Times, dans un article paru mardi 28 avril.
La meilleure nouvelle est venue du Montana, aux États-Unis. Six macaques rhésus, ayant reçu une dose du vaccin britannique il y a un mois, n’ont pas contracté le Covid-19 après y avoir été exposés, a rapporté le New York Times. D’autres spécimens, non vaccinés, étaient, quant à eux, tombés malades. « Les macaques rhésus sont ce qui se rapproche le plus de l’homme pour ce genre de tests », a affirmé au New York Times Vincent Munster, le scientifique qui a mené cette expérience.
Premiers tests en Europe sur des humains
« C’est vrai que c’est mieux que si cela avait été fait sur une souris », confirme Morgane Bomsel, biologiste moléculaire qui travaille sur le Covid-19 à l’Institut Cochin, contactée par France 24. Elle estime le résultat encourageant, mais elle met aussi en garde contre tout triomphalisme, ne serait-ce que parce que les détails de l’expérience menée dans le Montana n’ont pas encore été publiés. « On ne sait pas, par exemple, à quelle dose du virus les macaques ont été exposés, ni comment ils ont été contaminés », précise-t-elle.
Au Royaume-Uni aussi les travaux sur le ChAdOx1 nCov-19 avancent à grande vitesse. Le vaccin d’Oxford est devenu le premier en Europe à passer en phase de test sur des humains, le 24 avril. Les chercheurs britanniques ont commencé à recruter 1 110 volontaires sains, afin de mieux comprendre les effets du produit sur le corps humain. « Le but est de s’assurer que le vaccin n’est pas toxique pour l’organisme », précise Morgane Bomsel. En d’autres termes : avant de vérifier si le ChAdOx1 nCov-19 protège du Covid-19, encore faut-il garantir que le traitement n’est pas dangereux pour l’homme.
Ensuite, la procédure habituelle prévoit de « faire des prélèvements sanguins sur les sujets testés afin de vérifier en laboratoire la présence des anticorps et l’efficacité du vaccin contre le coronavirus », explique la biologiste de l’institut Cochin. Si leur plan se déroule sans accroc, des millions de doses de ChAdOx1 nCov-19 pourraient être disponibles dès septembre 2020, ont affirmé les chercheurs d’Oxford au New York Times. Ils auraient alors des mois d’avance sur le calendrier traditionnel de développement d’un vaccin. « On parle, en effet, généralement plutôt d’un délai de 18 mois », rappelle une virologue de la cellule de crise de la Société Française de Virologie (SFV), contactée par France 24.
Vaccin modulable
Si les équipes de l’université britannique promettent ainsi de battre des records de vitesse, c’est « parce que ce vaccin, en un sens, n’est pas nouveau », souligne la virologue française. En réalité, ces chercheurs ont utilisé une « plateforme technologique avec laquelle ils ont déjà pas mal d’expérience », précise-t-elle.
Le cœur du vaccin – le ChAdOx1 – est un adénovirus, c’est-à-dire appartenant à une famille de virus ayant des effets bénins sur l’homme, et présent chez les chimpanzés. « Il en existe aussi chez l’homme, mais les chercheurs ont préféré en prendre un chez le singe afin d’être sûr que le corps humain n’ait pas déjà développé des anticorps pour s’en prémunir », explique le membre de la SFV.
On peut ensuite y ajouter des bouts d’un autre virus pour fabriquer un vaccin. Par le passé, les chercheurs d’Oxford ont déjà utilisé le ChAdOx1 pour tester des vaccins contre Ebola, le Chikungunya, la fièvre de la Vallée du Rift et, surtout, le Mers, cet autre coronavirus cousin du Covid-19 qui a sévi au Moyen-Orient au début des années 2010. Dans ce dernier cas, les scientifiques britanniques ont eu des résultats très encourageants, notamment lors de tests sur les fameux macaques rhésus.
Pour le coronavirus actuel, ils ont simplement « ajouté la protéine de surface du Covid-19 au ChAdOx1 », note Morgane Bomsel. C’est cette partie du virus qui lui permet de s’accrocher aux cellules de l’hôte et de l’infecter. Le but de ce vaccin serait donc de permettre au corps humain de développer des défenses contre ce mécanisme d’abordage de la cellule humaine.
Comme la technologie est en place et qu’ils ont déjà procédé à des tests sur des humains pour d’autres vaccins utilisant le ChAdOx1, ils ont pu aller beaucoup plus vite pour l’adapter à la pandémie en cours et élaborer les protocoles des essais cliniques.
France24