
L’irruption du Covid-19 a mis entre parenthèses l’Europe sans passeport. Sera-t-il possible de ressusciter un jour l’espace Schengen, mis à mal en 2015 et 2016, durant la crise migratoire ? « Oui », assure la Commission de Bruxelles. « Douteux », observe, en revanche, une source diplomatique, soulignant le côté « totalement chaotique » de la situation actuelle. Le « déconfinement » des frontières s’apparente déjà à un redoutable casse-tête, tant la mise en place des contrôles sanitaires et des restrictions de passage a été improvisée quand l’Europe a pris conscience qu’elle devenait l’épicentre de la pandémie.
Le sort de ces mesures, en principe temporaires, devrait être abordé lors d’un prochain sommet européen, parallèlement à la lourde négociation sur la réponse économique à la crise. Paris souhaiterait l’adoption d’une série de principes, comme la non-fermeture des frontières, et un meilleur échange d’informations entre les capitales. Mais l’Elysée se dit conscient qu’« il ne sera pas possible d’aller vers une harmonisation parfaite entre les Etats membres, en raison des cycles différents de la pandémie sur leur territoire ».
La question des frontières et du déconfinement est débattue au plus haut niveau entre Paris et Berlin. Les ministres français et allemand de la santé, Olivier Véran et Jens Spahn, tentent de se concerter, tandis que l’Elysée et la chancellerie devaient faire de même, vendredi 10 avril. Au-delà des enjeux sanitaires et économiques, le sujet est ultrasensible : dans la Sarre, des Français ont été accusés de répandre le virus après que l’institut de santé allemand Robert-Koch eut qualifié la région Grand-Est de « zone à haut risque ». La ministre de l’économie sarroise, Anke Rehlinger, a présenté ses « excuses », mercredi, sur Twitter, à ces « Français qui se sont fait insulter ou à qui on a jeté des œufs ».